Le récit de Marie-Claude Guay
Le premier ministre irakien contesté, Nouri al-Maliki, a écarté, dans un discours surprise tard dimanche, les appels à sa démission, et a accusé le nouveau président du pays d'avoir commis une « claire violation constitutionnelle ».
Alors que les États-Unis poursuivent leur offensive dans le nord de l'Irak, des membres des forces spéciales irakiennes loyales au premier ministre irakien, le chiite Nouri Al-Maliki, se sont déployées dans plusieurs quartiers de Bagdad dimanche soir.
« Il y a une forte présence de membres de la sécurité, de la police et de l'armée, spécialement autour de la zone verte », un quartier hautement protégé où sont basées les institutions clés du pays, a indiqué un haut responsable de la police. D'autres milices chiites renforçaient aussi leurs patrouilles dans la capitale irakienne.
Ce déploiement de force est survenu 90 minutes seulement après le discours du premier ministre Al-Maliki à la télévision et pendant lequel il a réaffirmé son intention de briguer un troisième mandat, coûte que coûte.
Selon lui, le nouveau président irakien, Fouad Massoum, a enfreint la constitution en ne confiant pas à son parti - le principal bloc politique au Parlement à la suite des élections d'avril dernier - la charge de désigner le futur chef du gouvernement.
Une séance parlementaire prévue lundi pour discuter de l'élection et du poste de premier ministre a été remise au 19 août.
« Je déposerai un recours formel devant les tribunaux fédéraux contre le président de la République pour s'être rendu coupable d'une violation évidente de la constitution à des fins de calculs politiciens. » — Nouri Al-Maliki, lors de son discours télévisé
Pour un responsable du ministre de l'Intérieur, il ne fait aucun doute que le déploiement militaire est « lié à la situation politique ». « De nombreuses rues ont été fermées, ainsi que plusieurs ponts-clés », dit-il.
Washington, qui poursuit son offensive dans le nord de l'Irak avec une quatrième série de raids dimanche, a réagi en réaffirmant le soutien plein et entier des États-Unis au président Massoum.
Depuis le début du conflit en juin, ils sont nombreux au sein de la communauté internationale à penser que Nouri Al-Maliki, au pouvoir depuis 2006, ne fait pas partie d'une solution de paix à long terme pour l'Irak. D'ailleurs, selon le vice-président du Parlement irakien, Haider al Abadi, le bloc chiite serait sur le point de s'entendre sur un nouveau chef de gouvernement.
500 yazidis manquent à l'appel, selon l'Irak
Dans le Kurdistan irakien, le ministre irakien des Droits de l'homme a accusé les djihadistes de l'État islamique (EI) d'avoir assassiné au moins 500 membres de la minorité religieuse yazidie depuis le début de leur offensive récente dans le nord de l'Irak, avant de les inhumer dans des fosses communes.
Selon Mohamed Chia Al-Soudani, certains auraient été enterrés vivants. Il ajoute que l'EI aurait aussi enlevé 300 femmes pour en faire des esclaves.
Dimanche, entre 20 000 et 30 000 personnes, en majorité des femmes et des enfants qui s'étaient réfugiés dans les monts Sinjar, sont parvenues à fuir les attaques des djihadistes.
Ces réfugiés se trouveraient désormais dans la région autonome du Kurdistan irakien, « mais il en reste des milliers dans la montagne », a déploré la députée yazidie Vian Dakhil.
Les forces américaines ont d'ailleurs acheminé par avion des vivres et du matériel destinés aux milliers de yazidis réfugiés sur les monts Sinjar, entre Mossoul et la frontière syrienne, alors que se poursuit leur offensive aérienne.
Les militaires kurdes ont annoncé en marge une première victoire depuis longtemps. Selon un haut responsable, les soldats sont parvenus à reprendre le contrôle de deux localités situées à 45 kilomètres d'Erbil, Makhmour et Al-Gweir, qui étaient sous le joug des djihadistes.
Le Canada et la communauté internationale se mobilisent
Le ministre du Développement international, Christian Paradis, a annoncé dimanche une aide de 5 millions de dollars destinée aux victimes du conflit, dont 2,25 millions iront à trois organismes sur place, soit la Croix-Rouge, Mercy Corps et Aide à l'enfance-Canada.
Tout en condamnant dans les « termes les plus forts possible » les actions « terroristes de l'EIIS et le meurtre de civils innocents », le ministre Paradis emboîte le pas à l'Angleterre, la France et les États-Unis, qui ont déjà commencé à livrer une aide humanitaire au peuple irakien.
Après s'être retirés d'Irak, il y a trois ans, les États-Unis mènent de nouvelles frappes aériennes, depuis vendredi, dans le nord de l'Irak, contre les positions djihadistes, qui menacent le Kurdistan autonome. Samedi, l'armée a indiqué avoir mené à bien quatre frappes aériennes pour défendre les civils yazidis. L'offensive s'est poursuivie dimanche.
Anne Levasseur a rencontré des membres de la communauté chrétienne d'Irak à Montréal qui craignent pour leurs proches.
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