Préoccupé par la régression du français comme langue unique de travail, le Conseil supérieur de la langue française (CSLF) recommande au gouvernement du Québec de soumettre les entreprises de 25 à 49 personnes à une démarche de francisation obligatoire.
Le CSLF s'appuie sur certaines enquêtes révélant que la place du français dans le monde du travail a reculé entre 1989 et 2010.
Intitulé « Redynamiser la politique linguistique du Québec », l'avis a été rendu public mercredi par le président du CSLF, Robert Vézina. La publication survient au moment même où l'Assemblée nationale s'apprête à entreprendre l'étude du projet de loi 14, qui vise à renforcer la Charte de la langue française (loi 101), adoptée en 1977.
« Le défi demeure de réserver l'usage de l'anglais aux circonstances où celui-ci est vraiment nécessaire. » — Robert Vézina, président du Conseil supérieur de la langue française
Bien qu'il souligne l'importance d'envoyer un « signal clair », M. Vézina affirme que la démarche de francisation obligatoire suivrait une formule « allégée et souple ». L'organisme privilégierait « l'accompagnement et la sensibilisation », plutôt que la « coercition », a-t-il précisé en entrevue à Radio-Canada.
Selon M. Vézina, l'un des nombreux facteurs expliquant le déclin du français au travail serait le fait que certains employeurs de petites entreprises « ne sont pas au courant des droits de leurs travailleurs » en matière de langue. Il ajoute que ces petites entreprises sont souvent la porte d'entrée des nouveaux arrivants sur le marché du travail, surtout dans la région de Montréal.
Une francisation « qualifiante »
Le CSLF estime aussi que Québec devrait faire davantage pour franciser les immigrants, de manière à ce qu'ils puissent dépasser une « francisation de base qui leur permet de se débrouiller dans la vie quotidienne ».
En suivant des cours de français spécifiques à leur domaine de travail, les néo-Québécois pourraient maîtriser un vocabulaire spécialisé et atteindre « des niveaux de compétence plus avancés », suggère M. Vézina.
Il ajoute que 40 % des nouveaux arrivants ne s'inscrivent à aucun cours de français, d'où la nécessité d'élargir l'offre de cours et de fournir un effort de sensibilisation.
Par ailleurs, le CSLF juge que tous les élèves qui obtiennent un diplôme collégial, que ce soit dans le réseau francophone ou anglophone, devraient avoir acquis une maîtrise du français adéquate. Parmi les scénarios envisageables, il y aurait la maîtrise du français comme condition d'octroi du diplôme collégial.
La question des villes bilingues ne faisait pas partie des travaux entourant l'avis de mercredi.
La ministre de Courcy satisfaite, mais pas l'opposition
La ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane de Courcy a accueilli favorablement l'avis du Conseil supérieur de la langue française. Elle a indiqué que ces mesures vont dans le sens du projet de loi 14, auquel s'opposent les libéraux.
Ainsi, l'opposition officielle s'est déjà exprimée contre le projet de loi 14 déposé en décembre, et le groupe d'élus de la Coalition avenir Québec (CAQ), qui détient la balance du pouvoir, semble lui aussi prendre ses distances du texte péquiste.
Le porte-parole du chef François Legault, Jean-François Del Torchio, a précisé que la position du parti serait connue mardi prochain, lorsque débutera la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi.
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