Sécurité et libertés : un équilibre à trouver

Written By Unknown on Sabtu, 25 Oktober 2014 | 14.18

Au-delà de l'émotion suscitée par les tragiques événements des derniers jours, il y a la nécessité d'agir. Mais comment? Pour certains, il faut resserrer les lois et la sécurité pour que les terroristes et leurs acolytes ne puissent plus se faufiler entre leurs mailles, alors que d'autres prônent la prudence, soutenant que légiférer dans le feu de la panique, c'est risquer de brimer des libertés et faire ainsi le jeu des extrémistes. 

Au soir de la fusillade à Ottawa, Gilles Duceppe a eu ces mots dont il ne soupçonnait peut-être pas le retentissement : « En situation de guerre, toute personne se livrant à de la propagande en faveur de l'ennemi peut être traduite en justice et éventuellement condamnée. » En clair, des individus peuvent être arrêtés ou condamnés sur la base des opinions qu'ils ont exprimées.

L'avocat Julius Grey y voit un risque de dérapage et exprime son profond désaccord avec l'ex-chef bloquiste. « Il avait tort sur cette question, à mon avis, parce qu'il ne faut pas avoir des crimes d'opinion », plaide le militant des droits de la personne sur les ondes de Radio-Canada.

Rappelant les ravages du maccarthysme aux États-Unis dans les années 1950, Me Grey précise qu'« on peut être puni pour des crimes, pour des complots, mais pas pour les opinions, même si ces opinions sont incompréhensibles, stupides, véhémentes et inacceptables. »

Entrevue avec le ministre Steven Blaney

Resserrer l'étau légal

Les appels au resserrement des lois antiterroristes n'ont pas tardé à fuser au lendemain des attaques à Ottawa et à Saint-Jean-sur-Richelieu. Hasard du calendrier, le gouvernement Harper va déposer dans les prochains jours un projet de loi pour renforcer les pouvoirs des autorités sécuritaires.

Profitera-t-il de la peur ambiante pour proposer une législation musclée? Le ministre de la Sécurité publique, Steven Blaney, a dit que son gouvernement souhaitait que davantage de pouvoirs soient dévolus au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). « Le défi, ce sont les seuils qui permettent soit de procéder à des arrestations préventives, soit à des accusations qui mènent à des sentences, ou à des opérations plus simples », a expliqué le ministre.

Pourtant, pour bien des spécialistes, l'arsenal juridique actuel est largement suffisant pour faire face aux menaces terroristes.

L'avocat et criminaliste Jean-Claude Hébert signale qu'en matière de terrorisme les « soupçons raisonnables » des services de sécurité peuvent constituer une preuve, selon notre système juridique. « Or, le ministre [Steven Blaney] nous dit qu'il veut abaisser le niveau. Je me demande bien où on va être rendus en bas des soupçons », affirme-t-il.

« L'arrestation préventive, ça existe déjà. À partir du moment où un policier a des soupçons raisonnables que quelqu'un est mêlé à des activités terroristes ou favorise des activités terroristes, il peut l'arrêter, l'amener devant un juge et là faire une audition qui est quand même assez rapide. C'est simple comme procédure. » — L'avocat et criminaliste Jean-Claude Hébert

Pour Pierre-Yves Bourduas, ancien sous-commissaire adjoint à la GRC, ce dont les policiers ont besoin, ce sont beaucoup plus des effectifs additionnels pour mener les enquêtes nécessaires. « Les corps policiers, présentement, ont des outils. Et il y a un certain nombre de ces outils-là qu'ils n'utilisent même pas ou à peu près pas ».

Me Hébert croit déceler un « penchant naturel » chez les policiers à demander constamment plus de moyens et des lois plus musclées au gouvernement, qui a souvent accédé à leur demande, d'après lui.

Cela dit, il ne comprend pas qu'avec tous les outils dont ils disposent, les services de sécurité n'ont pas réussi à prévenir et neutraliser à temps la menace terroriste à Ottawa et à Saint-Jean-sur-Richelieu. « C'est une très bonne question à laquelle, tôt ou tard, les services de police auront à répondre. Ils ne pourront pas toujours dire : ''on manque de ci, on manque d'argent''. Il y a quand même eu peut-être une certaine forme de négligence. On a tous vu et constaté que la sécurité pour ce qui est du parlement, ce n'était pas fort, fort. Il y aurait pu y avoir quelque chose de mieux préparé, de mieux sécurisé que ce qu'on a vu dans les images, dans les reportages ».

« Il y a un examen de conscience à faire de la part des forces policières, des services de renseignement, des gens qui s'occupent de la sécurité. Et il va falloir qu'ils assument leur responsabilité eux aussi et qu'ils admettent qu'à un moment donné, ils ont peut-être été un petit peu lents à agir. » —  Jean-Claude Hébert

Un outil nommé le Code criminel

Les amendements apportés l'année dernière au Code criminel fournissent suffisamment d'outils aux policiers, en ce sens qu'ils permettent d'obtenir « l'interrogatoire d'un individu, s'il y a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction de terrorisme sera commise ».

Plus encore, en vertu de ces modifications, des restrictions « allant jusqu'à un emprisonnement d'un an » peuvent être imposées à une personne à laquelle on prête des velléités terroristes avec « des motifs raisonnables ».

D'aucuns diront qu'il y avait là assez d'instruments légaux pour permettre aux policiers de mettre en détention Martin Couture-Rouleau, qui a tué un des deux militaires sur lesquels il a foncé avec sa voiture. Le jeune homme de Saint-Jean-sur-Richelieu, identifié comme « voyageur à haut risque », était déjà sous surveillance. La GRC lui avait retiré son passeport pour éviter qu'il se rende en Syrie et l'a arrêté avant de le relâcher rapidement, car « la preuve ne permettait pas de l'inculper ».

Éviter les dérives

S'il convient que la surveillance est indispensable pour épier et décourager des terroristes potentiels, Julius Grey estime néanmoins qu'« on n'a pas besoin d'une nouvelle loi qui permet l'arrestation de quelqu'un sans procès ou sans accusation, ni de fouille quand il n'y pas une supervision judiciaire. Parce que ça, ça devient très dangereux. Ça laisse toute la discrétion à des gens. Certains vont être très bien, mais d'autres peuvent être trop péremptoires, injustes, partisans, qui sait? »

« Quand il y a une forme de révision judiciaire ou parlementaire, quand la police ou les organismes de surveillance n'ont pas une discrétion sans limites, on peut espérer que les dérapages, bien qu'ils puissent arriver, soient peu nombreux. Si on adopte une loi très large, tout est à craindre.  » — Julius Grey

Légiférer dans l'urgence est déjà un motif de préoccupation pour Julius Grey : « [...] De temps en temps, il faut revoir les lois, je ne suis pas quelqu'un qui pense que la sécurité est figée - notamment du point de vue technologique, il y a de nouvelles choses qui sont disponibles, il faut encadrer et en même temps permettre leur utilisation. Mais ce qu'il ne faut pas, c'est avoir des lois qui sont dictées par une réaction compréhensible, mais exagérée et également dangereuse ».

L'avocat craint qu'une psychose généralisée conduise le pays à tomber dans le piège des terroristes, celui de limiter les libertés. « Ce qui est important, c'est de préserver l'équilibre entre la sécurité et les libertés publiques, parce que, d'une part, la sécurité, il en faut, mais les libertés publiques sont essentielles », fait-il remarquer.

« Eux [les terroristes], ils n'ont pas de liberté chez eux, ils n'ont pas d'égalité et de justice sociale. S'ils réussissent à ébranler notre État pour enlever justement la justice sociale, les libertés publiques, ça va être une victoire assez considérable [pour eux]. » — Julius Grey

Loi sur les services de renseignement : reportage de Daniel Thibeault

L'opposition prudente

Les partis de l'opposition ne voient pas non plus d'un bon œil le fait de légiférer dans un contexte de fébrilité. 

« [...] Je pense que, comme dans bien des choses, il faut attendre que la poussière retombe », plaide Françoise Boivin, la porte-parole du parti du NPD en matière de justice, qui rappelle que les conservateurs ont déjà adopté « énormément de choses » dans le cadre de leur programme législatif de loi et d'ordre.

« Commençons par regarder nos lois actuelles, ce que l'on a, et voir (...) s'il y avait des manques par rapport à ce qui s'est passé cette semaine ou s'il y aurait des choses qui auraient pu être utilisées.  » — Françoise Boivin, députée du NPD

Le NPD préconise davantage de larges consultations auprès des experts et de la société civile avant recourir rapidement à un projet de loi.

Le Parti libéral propose pour sa part la mise en place d'un comité permanent, qui serait composé des élus de la Chambre des communes, pour superviser les activités des agences sécuritaires du pays. Une option vite écartée par les conservateurs.

« On reconnaît le besoin d'avoir plus de mesures de sécurité, mais en même temps, il faut s'assurer qu'il n'y a pas d'abus du côté des droits humains », souligne le député Marc Garneau.


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